Un homme marchant sur l’eau. Le tableau est possible, si de la jacinthe d’eau a proliféré dans le coin, formant un tapis de forte densité. Seulement, ce cas de figure implique souvent des nuisances sur l’environnement
, des risques pour la santé humaine, la réduction de la navigabilité et du potentiel hydraulique, de l’envasement des fleuves et lacs, mais aussi des les stations de captage… En plus, l’eau contrainte de stagner devient le lit de maladies. Inutile d’en rajouter, la jacinthe d’eau mérite bien ses galons de danger public. Heureusement, les pouvoirs publics, la société civile et des Ong spécialisées ont décidé d’attaquer le mal à la racine depuis au moins 2007. Et, bonne nouvelle, il est possible de tirer profit de la plante.
Un atelier de sensibilisation des parties prenantes à la collecte et à la valorisation de la jacinthe d’eau dans le bassin hydrographique du Wouri s’est ouvert lundi à Douala. Occasion d’apprendre qu’un projet est en cours depuis 2010 à Bonabéri. La jacinthe collectée est transformée, au bout de divers processus, en meubles, en sacs à main ou de marché, mais également en papier, en enveloppes. Autre « dérivé » possible, le compost.
Selon une présentation faite hier en début d’atelier, le combat contre la jacinthe d’eau pour les trois prochaines années nécessite 1,3 milliard F. A côté du projet pilote de Bonabéri, d’autres sites de valorisation devraient voir le jour sous peu à Darak, Douala V, Lagdo, et Mbalmayo. Toujours d’après cette présentation, cette plante a été introduite au Cameroun. C’est donc une espèce dite non native, qui a développé des capacités spécifiques pour s’imposer. Ce faisant, elle est devenue nuisible. L’atelier, ouvert par M. Wassouni, directeur de la Conservation au ministère de l’Environnement, de la Protection de la Nature et du Développement durable, s’achève ce jour.
Mexique: la fibre de jacinthe d'eau, une trouvaille à la pointe de l’écologie
La jacinthe d'eau ne laisse aucun répit. A peine les canaux nettoyés, ils se recouvrent aussitôt. La jacinthe couvre 70% des plans d'eau mexicains.
La jacinthe d'eau ne laisse aucun répit. A peine les canaux nettoyés, ils se recouvrent aussitôt. La jacinthe couvre 70% des plans d'eau mexicains.
Par Patrice Gouy
Une start-up mexicaine valorise durablement la jacinthe d’eau en utilisant sa fibre pour lutter contre les marées noires. Mais en creusant, il s'avère que cette fibre a bien d'autres avantages et usages possibles. Une matière première particulièrement prometteuse.
De notre correspondant à Mexico
Aux quatre coins du monde, l’homme a cherché des solutions pour se débarrasser de la jacinthe d’eau, plante tropicale flottante qui perturbe le transport fluvial, bouche les moteurs des générateurs des usines hydro-électriques et favorise l’évapotranspiration, ce qui assèche les plans d’eau et diminue la biodiversité.
La jacinthe d'eau a une grande capacité d’adaptation. Elle est devenue un problème majeur dans tous les grands fleuves comme le Nil, le Niger, le Congo, le Zaïre, sur les grands lacs africains comme le Victoria, le Tanganyika, le Malawi. Elle infeste la partie sud de la Chine, la Thaïlande, le Vietnam et l’Indonésie. Elle commence à faire son apparition en Europe, et même en Russie.
Une plante qui croît plus vite qu’on ne la détruit
En 1999, Tema, une entreprise mexicaine spécialisée dans l’environnement, créée par Lorenzo et Carlos Vargas, obtient un contrat pour nettoyer un barrage couvert de jacinthes d’eau. Les deux frères passionnés d’écologie s’interrogent sur l’utilité de cette plante et sur la valorisation qu’ils pourraient en faire. Elle assimile les polluants, en particulier les nitrates et les phosphates. Son rôle est important dans le domaine du changement climatique car elle absorbe du CO2 et fait la photosynthèse.
On peut dire que c’est un filtre naturel. Mais avec le changement climatique, dans les cinquante prochaines années, qu’il y ait des inondations ou des sécheresses, la jacinthe d’eau va être de plus en plus présente dans les retenues d’eau ou les barrages. Nous nous sommes rendus compte que nous pouvions innover et améliorer les méthodologies existantes concernant son exploitation.
Pas d'effet nocif pour l'environnement
En cherchant une valeur ajoutée pour financer son ramassage et la récupération des plans d’eau, Tema a découvert que l’on pouvait, par trituration de la plante, fabriquer une fibre absorbante. La jacinthe possède une tige dont la structure est creuse. Les recherches en laboratoire ont permis de découvrir que cette structure caverneuse et spongieuse pouvait absorber des liquides. Une fois traitée, elle peut absorber quatre à cinq fois son poids en eau, en huile ordinaire, en essence et jusqu’à 50 fois son poids lorsqu’il s’agit de pétrole brut.
Pemex, la compagnie des pétroles mexicains, s’est immédiatement intéressée à cette découverte. Car avec une production de trois millions de barils de pétrole par jour, l'entreprise a en permanence des problèmes de fuites de carburant. Sur les plates-formes pétrolières, ces dernières représentent 1% à 2% du pétrole extrait. C’est énorme ! Pemex utilise donc sans cesse des produits dispersants.
Or, en plus d’être absorbante, la fibre issue de la jacinthe d'eau est biodégradable, et n’a pas d’effet nocif sur l’environnement. Elle est également très efficace pour nettoyer les côtes, récupérer les plantes touchées par les hydrocarbures (comme les palétuviers), les mangroves ou encore pour récupérer les zones marécageuses difficiles d'accès.
Des litières pour animaux, des plastiques vraiment biodégradables
Les ingénieurs de Tema travaillent depuis un an sur d’autres filières. Leur fibre absorbante permet de faire des litières pour animaux domestiques, ce qui intéresse beaucoup les vétérinaires. La fibre absorbe l’urine, les odeurs et les humidités des excréments, dont on peut facilement se débarrasser.
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