Quand on sait (ou ne sait pas) que le bisphénol A (BPA) est l’un des composés chimiques les plus abondants dans de nombreuses applications on peut se poser de réelles question sur son innocuité. Le BPA en chiffres : 7 millions de tonnes produites en 2013 pour un chiffre d’affaire global de 14 milliards de dollars et une croissance annuelle d’environ 4,5 %. Ce marché considérable se partage entre Bayer, Dow, SABIC et Mitsui et quelques autres firmes chinoises et indiennes. En très bref les applications du BPA vont des polycarbonates, résines époxydes, retardateurs de feu, polyacrylates, donc essentiellement l’industrie des plastiques dont les films et emballages alimentaires, peintures et vernis mais aussi le papier thermosensible. On comprend dès lors qu’il est impossible de trouver une personne exempte de BPA dans son sang ou ses urines à moins d’aller dans un village reculé de la forêt de Papouasie-Nouvelle Guinée à condition qu’aucun ustensile en plastique ne soit utilisé dans ce village !
C’est sur l’application du BPA dans l’élaboration des papiers thermosensibles qu’une équipe de biologistes se répartissant entre l’Université du Missouri à Columbia et l’Université et l’INRA de Toulouse en France s’est penchée pour suivre le devenir du BPA dans l’organisme, une première mondiale dont les résultats sont tout simplement alarmants. Les résultats sont en effet assez effrayants surtout quand on sait que le BPA est reconnu comme étant un puissant perturbateur endocrinien. Les régulateurs ont tout simplement « oublié » la possibilité d’un passage direct dans le sang du BPA par contact avec la peau.
Madame, quand vous scrutez la note que vous tend la caissière de votre supermarché préféré, il ne fait plus aucun doute que le simple fait de tenir ce bout de papier entre vos mains vous contamine et d’autant plus si vous vous êtes lavé les mains avec un de ces détergents qu’on trouve de partout dans les toilettes ou tout simplement si vous avez les mains moites. Le BPA a tendance à mieux imprégner les mains si celles-ci sont propres ou humides ! Et si en sortant du magasin pour aller retrouver votre voiture vous ne pouvez pas résister à ouvrir un paquet de chips alors là vous aggravez votre cas, en quelque sorte vous inondez votre corps par deux voies, la peau et votre tube digestif en transférant le BPA de vos doigts sur les chips sans parler des traces de BPA provenant du sachet papier plastifié à l’intérieur contenant les dites chips.
C’est exactement ce qui se passe dans n’importe quel débit de malbouffe pudiquement appelé fast-food. Vous commandez votre truc préféré immangeable, hamburger ou chicken nuggets selon votre préférence, on vous donne votre ticket de caisse et vous payez. En attendant votre boite en carton contenant votre malbouffe préférée vous allez vous laver les mains, tous les fast-foods sont équipés de toilettes, vous revenez et tendez votre ticket que vous avez soigneusement gardé pour récupérer vos frites et des trucs que je ne nommerai pas et là vous vous contaminez soigneusement :
Avec une crème solaire qui contient des anti-inflammatoires pour bien faire croire qu’elle est efficace contre les UV, c’est presque pire puisque la dite crème contient également des adjuvants accélérant la pénétration trans-dermique de ces produits et si vous allez à la buvette du coin au bord de la plage acheter un sandwich et une boisson gazeuse, vous avez aussi tripoté un ticket de caisse couvert de BPA et c’est tant pis, en moins d’une minute ce produit inonde votre organisme sans que le foie ait compris quoi que ce soit à des concentrations similaires à celles des hormones stéroïdes comme l’estradiol ou la testostérone ! Près de la moitié des papiers thermosensibles contient maintenant du BPS (voir le lien ci-dessous) autorisé par la loi parce que ce n’est plus du BPA mais du 4,4′-sulfonyldiphénol tout aussi bon perturbateur endocrinien que son cousin le BPA. Les industriels de la chimie continuent donc à nous empoisonner et perturber notre système endocrinien allègrement, 14 milliards de dollars c’est loin d’être négligeable et tant pis pour la santé de l’ensemble de l’humanité. Seulement aux Etats-Unis on estime que les dommages sur la santé dus au BPA (et au BPS) représentent un coût de 1,5 milliard de dollars par an. Pour conclure ce billet alarmiste voici une énumération non exhaustive des effets de ces produits qui interfèrent avec les récepteurs de l’estradiol et dans une moindre mesure de la testostérone. Chez les femmes : kystes ovariens, fertilité féminine diminuée, fausse-couche, accouchement avant terme, cancer du sein. Chez les hommes : diminution de la libido, qualité du sperme diminuée, diminution du taux d’hormones sexuelles. Et tant chez les femmes que chez les hommes : taux d’hormones thyroïdiennes altéré, obésité, perturbation des fonctions du foie, du système immunitaire et des fonctions rénales, inflammations, déficits neuro-comportementaux comme l’agressivité, l’hyperactivité et l’inattention, en particulier chez les enfants. C’est particulièrement alarmant pour toutes les caissières et caissiers de supermarché, ils sont de plus en plus mal embouchés, mais c’est vrai, il sont tous de mauvaise humeur et à la lecture de l’article cité en référence on le comprend !
Mais ce n’est pas tout, le papier recyclé de plus en plus utilisé pour plaire cette fois aux écologistes contient des quantités massives de BPA et on se contamine allègrement en lisant un livre ou un journal imprimé avec du papier écolo-compatible car le traitement des papiers usagés libère le BPA sous forme de monomère des papiers plastifiées à usage d’emballage alimentaire, terrible tableau ! Les chimistes sus-nommés s’en moquent, les instances de régulation ne leur ont jamais demandé d’étudier la pénétration trans-dermique ni du BPA ni du BPS, le protocole étant un gavage de souris avec des aliments contenant ces produits imposé par ces mêmes instances régulatrices que ce soit aux USA, au Japon ou en Europe, le BPA se trouvant instantanément transformé dans le foie pour être rapidement éliminé dans les urines sous une forme conjuguée qui n’est plus que très faiblement perturbatrice. Evidemment ce n’est pas de la faute des chimistes ni d’ailleurs des régulateurs. Ce qui suscite l’intérêt dans cette étude est un article paru dans Forbes (voir aussi le lien) qui critique amèrement ces travaux. Il est évident que Forbes ne cache pas ses penchants pour les grandes entreprises et les grandes fortunes et on peut dire que le commentaire d’un certain Geoffray Kabat est tout à fait dans la philosophie de ce site totalement dédié à la puissance de l’argent quelle que soit la manière dont il provient … On vit dans un monde surréaliste où une connivence très suspecte s’est installée entre les industriels et les politiciens. Les politiciens en charge de la régulation des produits mis sur le marché sont certainement soudoyés par les lobbys industriels, cela ne fait aucun doute, car l’enjeu financier est considérable et les dits industriels n’ont plus aucun scrupule comme par exemple remplacer le BPA par le BPS, tout simplement une mascarade, mais une mascarade légale. C’est tout simplement révoltant et écoeurant !
Source PlosOne en libre accès : DOI: 10.1371/journal.pone.0110509
http://www.forbes.com/sites/geoffreykabat/2014/10/24/the-alternative-universe-in-which-bpa-is-a-major-health-threat/
http://jacqueshenry.wordpress.com/2012/10/06/nouvelles-du-bisphenol-a-a-en-fremir-dhorreur/
http://jacqueshenry.wordpress.com/2013/01/23/la-chimie-industrielle-est-vraiment-pourrie/
et aussi ce récent billet sur ce blog :
http://jacqueshenry.wordpress.com/2014/10/21/obesite-estradiol-cerveau-et-acide-palmitique-un-curieux-melange/
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